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MZUMGO.......

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Margot MZUMGO.......

Message  Mimi* Lun 2 Juil - 18:53

Çà gaze?   MZUMGO
Ce matin je me suis réveillée dans un silence stupéfiant.
Mais que se passait-il ?
Mais !!! Les coqs ! Que faisaient-ils ?
Les coqs de Moshi.
Je les ai comptés très précisément, j’en ai eu le temps ces dix jours passés à « Casablanca inn »,
il y en a 3 milliards 874 millions 718 mille 326. J’étais au centre d’une immense circonférence remplie de coqs chantant comme des fous furieux de 5heures à 8h du matin.
Si je me réveille aujourd’hui dans ce grand silence c’est que je ne suis plus à Moshi, je suis revenue chez moi à Paris.
Je devais faire un grand Trek en Mongolie cette année mais mon genou droit en avait décidé autrement. Il n’avait autorisation, et avec des médicaments de chevaux, qu’à 2 Kms par jour sur du plat. C’était le moment d’aller en Tanzanie mettre la dernière main aux projets auxquels nous travaillions depuis un an avec Abeid, projets qui patinaient faute de pouvoir bien nous comprendre par internet. Surtout dans un cyber-café en ce qui le concernait.

Ça faisait bien un mois que j’avais mon billet et voilà maintenant j’étais dans l’avion pour la Tanzanie.
Ma place était entre deux autres dans la rangée centrale. Quand j’ai voulu mettre mon sac dans le coffre, je me suis bien demandée comment j’allais faire. C’était beaucoup trop haut ! Le jeune homme près de qui j’allais voyager s’est immédiatement levé et a placé mon bagage. J’ai compris que dans la construction d’un avion, la courtoisie était une donnée prise en compte. Et que, si elle venait à disparaître, il faudrait changer les plans de l’avion.
En tous cas j’étais à peine assise que mon voisin, voyant qu’il ne serait plus dérangé, s’est endormi. Un peu plus tard, dans son sommeil il s’est encore mieux installé et a débordé sur mon territoire. Après une brève réunion de concertation avec moi-même j’ai décidé de le laisser dormir tranquille. Ce n’était pas de la goujaterie puisqu’il m’avait aidée si rapidement donc ce n’était pas un problème. Il était si grand pour ce petit siège.
Je me suis préoccupée de mes joujoux de vol. Mes tâtonnements infructueux ont attiré l’attention de ma voisine de droite et d’un voisin plus loin, deux Tanzaniens habitués à ce voyage. Ils me montrèrent le fonctionnement de la zapette et des oreillettes qui ne voulaient pas tenir en place.
J’avais inversé les deux oreilles.
Le voyage s’est bien passé. Une demie heure avant l’arrivée, mon voisin de gauche s’est réveillé, a constaté notre arrivée imminente et a entamé la conversation. C’était un jeune Canadien d'une trentaine d'années, envoyé par sa boîte canadienne qui exploitait une mine d’or en Tanzanie pour mettre en place un nouveau système de broyage du minerai. Je lui ai demandé s’ils polluaient la Tanzanie au mercure pour extraire l’or ? Mais il parait que c’est une méthode complètement dépassée et que, aujourd’hui, les miniers avaient obligation de tenir compte de l’environnement.
Je repense aux dégâts entraînés par l'exploitation du nickel en Nouvelle Calédonie et j’ai du mal à le croire. Quand l’avion s’est posé nous avons vite vite échangé nos téléphones et nos mails, nous étions devenus amis pour la vie ! Lui continuait sur Dar Es Salaam et moi je descendais à l’aéroport du Kilimanjaro.
Abeid !!! Que j’étais contente de le revoir. On a pris le taxi de Vincenty, un de ses copains, et on n’a pas arrêté de parler car il y avait tout le temps autre chose à se raconter.

Ils m’ont amenée dans un petit hôtel de la banlieue de Moshi, "Casablanca inn", une sorte de caravansérail moderne derrière de hauts murs, fermé le soir par de lourdes portes de fer, des chambres en béton construites le long d’une cour réservée aux véhicules. Une grande véranda pour boire un pot et une autre véranda plus bas pour les repas ou le petit déjeuner. On a posé les bagages dans ma chambre puis nous sommes allés manger. Ils n’ont commandé qu’un repas, pour moi, et ont pris un coca local. L’assiette était bien trop importante pour moi toute seule. Nous avons demandé trois cuillères, creusé trois frontières dans le riz, la sauce, les légumes et la viande et nous avons mangé tous les trois.
Le riz était délicieux mais ici, comme chez nous il y a cinquante ans, il y a parfois des petits cailloux dedans. Il ne faut pas trop mâcher. Cette sauce avec des épices que je ne connaissais pas était délicieuse aussi.
Abeid m’a donné rendez-vous le lendemain matin à neuf heures.
Alors qu’il était déjà debout il me dit que demain pour le petit déjeuner j’aurai du thé ou du café du Kilimanjaro, du pain de la confiture des os…
« Comment ça des os ? Des os comme ça ?
Je tape sur mon poignet gauche avec l’index droit
_ Mais non des os de poulet
En un éclair je me révise la technique d’Othello mon chien pour manger les os de poulet ; les attaquer par les bouts, c’est leur point faible aux os de poulet ! Mais quand même, la perspective ne me réjouit pas autant que je le souhaiterais. Je dis à Abeid que je n’ai pas très envie d’os de poulet au petit déjeuner.
_ Mais non ! Des o que font les poulets !!!

à suivre....
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Margot Re: MZUMGO.......

Message  solaire Mar 3 Juil - 9:50

ah chouette ma Mimi !

tu nous entraines dans un nouveau voyage, toujours tres vivant et si bien écrit

Tu parles! les o de poulet.... il fallait y penser !! à le langage et les accents !! trop marrant les bévues !

merci ma belle et à plus tard pour la suite

bisoussssss
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Margot Re: MZUMGO.......

Message  Mimi* Mar 3 Juil - 21:47

Çà gaze? 2ème jour



Le lendemain, mercredi 31 octobre donc, j’ai ouvert difficilement les yeux aux chants des coqs, j’ai jeté un œil sur mon portable, il était 6h. En faisant le calcul 6h+2h de décalage horaire entre France et Tanzanie, catastrophe !! Il était 8h ! Il fallait déjà se lever pour ranger un peu mon bazar et déjeuner avant l’arrivée d’Abeid !
Que c’était difficile ! Enfin je suis arrivée sous la véranda du petit déjeuner. C’était le désert. Personne ! J’ai attendu une heure avant que quelqu’une arrive, très ensommeillée aussi. Elle m’a dit :
« Five minutes please »
Et trois quarts d’heure après elle a posé sur la table une omelette et du thé etc. J’ai avalé ça en trois minutes et j’étais prête à l’heure pour recevoir Abeid.
Abeid n’arrivait pas.
J’ai fini par partir me promener dans la direction que j’avais repérée la veille.
J’ai pris des routes extrêmement défoncées et très rouges ; très volatiles. Tout le monde sortait pour me voir, m’interpeller, me saluer « jumbo ». En général de façon assez agréable. Mais avec ironie aussi parfois, c’était plus rare. Un homme âgé qui poussait une brouette a lâché sa brouette, m’a pris les deux mains dans les siennes pour me souhaiter la bienvenue « Karibu sana » puis est reparti avec sa brouette.
Je suis revenue à l’hôtel.
J’ai attendu encore… encore …
Enfin à 10h30 de mon portable (12h30 donc si je comptais les 2h de décalage) Abeid est arrivé. Il avait eu des difficultés qu’il tenta de m’expliquer mais j’ai rouspété, je lui ai dit que trois heures et demie de retard ce n’était pas possible et qu’il aurait dû m’avertir. Mais lui ne voyait pas comment ça pouvait faire 3h1/2 de retard alors que sa montre marquait 10h30.
Pareil que mon portable !
Je me suis rendue compte ainsi que mon portable s’était mis tout seul à l’heure tanzanienne. Et que quand je me suis réveillée à 6h pensant qu’il était 8h ici, il était 4h du matin en France.
Mais de toutes façons, l’heure tanzanienne est matinée de swahili et ça la rend difficile à maîtriser ; elle est insaisissable.
On s’y fait assez vite.

Par internet nous avions préparé le programme de ce voyage et fait le calcul de ce qu’il coûterait. Ce matin-là j’ai donc confié à Abeid la somme prévue et il s’occupe de tout : logements, transports, repas,
eau minérale, entrées dans les parcs et musées, pourboires. Dés lors je suis complètement zen car ce pays est anglophone et ici ce sont des shillings. Et je ne connais pas les pratiques en ce qui concerne les pourboires.
Un étranger ça fait monter immédiatement les prix. Abeid gère avec fermeté et ramène les prix à leur niveau ordinaire. Une fois nous attendions un mini-mini bus (c’est gros comme un combi-wolkswagen) 21 places mais bien tassés on rentre à 28 (quatre devant y compris le chauffeur ; juste contre ces sièges, une petite banquette en bois étroite, quatre places aussi. En face les genoux emmêlés deux places.
Derrière, très proches, une banquette de trois places. Tout près derrière, encore trois places et un strapontin. Enfin, derrière, tout aussi proches, les quatre dernières places. Dans tous les interstices, des personnes debout et les enfants assis sur les genoux des personnes qui le veulent bien, connues ou inconnues,).
Les bus n’affichent pas bien clairement leur direction. C’est l’aide chauffeur qui crie la direction, accroché à la portière coulissante, ouverte pour ne pas empiéter sur les 4dm carrés pouvant être affectés à un passager.
L’aide chauffeur tapa sur le toit du bus pour le faire arrêter devant nous. Il nous demanda si nous voulions monter.
« Vous allez à la gare (routière) ? demanda Abeid
- Oui
Nous montons.
Mais en fait ils n’allaient pas à la gare. Bien que nous ayant rapprochés, il nous restait une bonne trotte.
Abeid refusa de payer les deux voyages. Il n’en paya qu’un après s’être fait prier.
Ce jeudi soir, impossible de dormir. Dans la chambre à côté de la mienne une femme pousse des petits cris de plaisir, rit, puis rit en protestant, finalement elle se met à pleurer, proteste encore mais en pleurant.
Parfois elle s’arrête ; Puis recommence à pleurer en gémissant.
Au début je me suis dit qu’ils s’amusaient bien tous les deux à côté. Puis je me suis inquiétée, que lui faisait-il ? Il la torturait ou quoi ? Il n’entendait pas qu’elle ne voulait plus ? Ou pas ? Ou pas ça ? Ou pas tout de suite ? Ou…
J’étais angoissée, comment ça allait se terminer tout ça ?
Ça s’est terminé avec le film. C’était quelqu’une qui était hyper sensible aux films TV.
Peu après que le film fut terminé, lui est arrivé.
Ils ont mis de la musique et ont parlé avec animation. Ce n’était pas exagéré et ils n’étaient pas responsables de ce qu’il n’y avait aucune isolation phonique. Les heures ont défilé et à minuit et demi ils ont éteint la musique et le silence s’est installé. Mais non ! Bientôt elle a à nouveau poussé des petits gémissements qui devinrent de plus en plus rauques jusqu’à des râles finals qu’elle tentait d’étouffer. Le silence s’installa. Mais non ! Un petit bruit aigre et régulier commença. Qu’est-ce qu’elle avait encore ?
Qu’est-ce qui lui arrivait cette fois pour qu’elle fasse ce bruit-là ? Ah ! Non ! C’était le lit ! C’était à son tour à lui maintenant.
C’était un homme silencieux.
Enfin, chasse d’eau, dodo, rideau ! On a pu tous s’endormir.

A 6h29 du matin ils se sont mis à parler. C’était elle qui parlait toujours la première avec sa voix dansante. Et lui, lui répondait avec sa belle voix tranquille. Ces deux-là se sentaient vraiment bien ensemble. Les voix complètement accordées disaient leur intimité profonde.
A 6h49 leur voix de la journée est arrivée ; le swahili s’est animé, a pris des intonations, des interjections, des interrogations, des exclamations, le moteur d’une voiture a tourné dans la cour, qui les emporta à 7h08 au milieu de la multitude des chants de coqs.
Je me suis rendormie immédiatement et j'ai fait attendre Abeid une demi heure. Il n'était pas mécontent de me le faire remarquer.

L’an dernier, j’avais regretté que mon passage en Tanzanie, outre l’ascension du Kilimanjaro, ne m’ait rien fait connaître du pays. Abeid a pris la réalisation de ce souhait en main et je suis allée plusieurs fois déjeuner dans une partie ou l’autre de sa famille ici à Moshi.
Ce n’est pas simple comme je le pensais.
Si j’ai bien compris Abeid, on voit mzumgo (la blanche) assise dans les 4X4 ; on peut encore la voir en ville mais dans des endroits appropriés. Là il y en a une égarée dans leur maison et ça ils ne l’avaient jamais imaginé. Ils avaient pensé l’asseoir dans leur salon mais Abeid est allé chercher des tabourets bas et les a disposés dehors, près du feu abrité dans sa petite cabane de torchis indépendante, où la famille a l’habitude de s’asseoir pour discuter tranquillement. Là, mzumgo leur parait complètement déplacée, incongrue !!! Leur émotivité est à son comble. Ils rient à gorge déployée ! Chacun de mes mots déclenche des grands rires ! Ils les répètent en riant. On
interpelle même les voisins pour qu'ils viennent regarder mzumgo. Je suis E.T. chez les humains ici.
Le statut de chose bizarre n’est pas évident car ils ne rient pas avec moi mais ils rient ensemble à mon sujet.
En tant qu’invitée je dois manger deux énormes assiettes de riz viande et bananes vertes au lait de coco, c’est la politesse swahilie. En tant qu’E.T. je m’octroie le droit de ne prélever que la moitié de la première assiette. Mais je le fais avant de goûter pour que le goût ne soit pas en cause. D’ailleurs la nourriture ne peut être en cause, c’est la même que celle de mon enfance.
BabaMoussa et MamaMoussa (les deux parents sont toujours désignés par le prénom de leur premier enfant) me paraissent au demeurant très sympathiques ; chaleureux, attentifs. Mariage arrangé comme encore la plupart du temps ici ?? Ou pas ??? Ils s’entendent à merveille ! Belle famille pleine d’affection. Les sucreries que j’ai apportées sont proposées à tous les petits voisins qui passent par là (pas par hasard). Après le repas je ne comprends pas qu’ils voudraient bien faire une sieste ; ils me proposent un lit mais je ne suis pas fatiguée et je refuse ; je ne comprendrai que beaucoup plus tard qu'un oui les aurait bien arrangés.
Le soir quand je rentre à ma chambre, le mot que j'ai entendu le plus dans la journée continue d'exploser sans arrêt dans ma tête "mzumgo".

Dans le programme d’Abeid il est prévu que nous passions trois jours dans les montagnes d’Asumbara, vers Luchoto, pour rencontrer une autre partie de sa famille autour de sa grand-mère maternelle.
J'appréhende. Je dis à Abeid :
« Ils vont rire comme chez ta tante ?
Abeid a un regard inquiet vers moi avant de répondre :
- Pire
J’éclate de rire
- Mais ça ne va pas embêter ta grand-mère que j’aille la voir comme ça ?
- Non ! Ça va être la gloire pour elle dans tout le village !
Alors allons-y ! La gloire de la grand-mère d’Abeid m’importe.
J’ai d’ailleurs remarqué que, si à la première rencontre je semble être une chose, à la deuxième j’ai franchi une petite distance vers un statut d’humaine.

J’ai rencontré aussi des amis d’Abeid.
God Bless (Gody – en swahili on ajoute familièrement « y » aux prénoms masculins) m’a fait mourir de rire.
Nous l’avions rencontré en ville alors que nous allions déjeuner chez Aïcha la cousine d’Abeid. Il est donc venu manger avec nous sans que cela paraisse surprenant à qui que ce soit. ("Si un swahili en voit d’autres manger, il peut tout simplement venir s’ajouter"). Aïcha et sa petite famille habitent une chambre dans un "caravansérail" aussi. Ici, chambres en torchis alignées le long de la cour de terre. Un local commun à tous les locataires pour les wc et la douche ; la cuisine se fait dans la cour sur un feu de charbon de bois entre trois pierres. Quand on cherche un logement, on fait le tour, dans les divers quartiers, de ces caravansérails en demandant s’il y a une pièce à
louer. Il y a des caravansérails pour toutes les bourses : en torchis avec salle d'eau commune à tous, en adobes (briques de terre ; matériaux dont l'usage est en pleine expansion), en béton, ces deux dernières catégories comprenant des salles d'eau privées ou communes à la demande. Les pièces font toutes 3mX3.

Nous avons mangé très nombreux, dans la petite pièce chambre à coucher-salon de Aïcha, le riz pilaw et la salade de tomates. Aïcha avait allumé la TV. J’avais amené des rochers Ferrero et tous les voisins qui voulaient sont venus en prendre. Ils faisaient chaud et les friandises étaient en bouillie. A la TV c’était de la danse et des chants en swahili. Des jeunes dansaient dans la mer près de la plage. La caméra revenait souvent sur trois énoooormes femmes qui faisaient des démonstrations. Abeid me dit :
« Tu vois ça c’est de la danse de la côte. Ce n’est pas du hip Hop swahili.
Et God Bless lui coupe la parole et, avec les quatre mots de français qu’il a appris à son école de guide :
- Ca c’est du HipHopotame !
God Bless est chauffeur guide dans les parcs nationaux. Bientôt je le connaîtrai mieux car c’est avec lui et Abeid que je vais visiter ces parcs. A notre retour je suis invitée, le dimanche 11, à la cérémonie de ses accordailles pour son prochain mariage en février. Il viendra nous prendre pour nous amener à sa maison sur les flancs du Kilimanjaro.

Ce dimanche 4 novembre, Abeid et sa tante m’amènent passer la journée dans les rizières. Nous sommes partis en vélo, moi sur le porte bagage. Ca n’a l’air de rien dit comme ça mais il faut essayer d’imaginer les routes ici. D’ailleurs non, n’essayez pas, c’est inimaginable. Il a fallu une semaine pour que mes fesses finissent de cicatriser. Quand ça faisait trop mal je disais :
« Stop ! Il faut que je fasse une photo ! »
J’ai passé une belle journée ; Les paysages de rizières sont très paisibles. Très beaux. Très verts.
En face, la montagne dont les nuages épousent les flancs, c'est le toit de l'Afrique ! Le Kilimanjaro.
Il y a un petit morceau de mon chocolat là-haut sous une pierre.

C’était la période de la récolte. J’ai vu la coupe puis le battage du riz. On place les gerbes en rond autour d’un cercle, côté grains vers le centre vide. Puis quand c’est assez haut, on prend les tiges et on les bat dans le trou central. On met le riz en sac au fur et à mesure.

Des enfants payés pour ce travail crient ou sifflent pour faire fuir les vols d’oiseaux qui s’abattent sur les champs. En deux heures ils ravageraient une parcelle.
Entre les parcelles, des petits îlots de terre où se reposer, où poser le bébé sous un abri bricolé en feuilles de cocotiers, où cuisiner le ugali (u=ou) de midi et le manger ensemble. Le ugali est une bouillie de maïs très énergétique.
Provoquant l’hilarité générale, mzumgo a raté plusieurs fois l’improbable chemin entre les parcelles et a terminé la journée avec de la boue jusqu’aux genoux (En temps normal j’aurais pu sauter sans difficultés mais avec mon genou souffrant ce n’était pas possible).
Quelqu’un nous a apporté des cannes à sucre. MamaMoussa attendait mzumgo au tournant et riait déjà tout ce qu’elle pouvait. J’ai demandé à Abeid de lui dire que, bien avant qu’elle soit née, je chiquais déjà de la canne à sucre.

Hé oui ! C’est fou ce que je retrouve ma Nouvelle Calédonie ici. Pas la Calédonie d’aujourd’hui qui a sans doute changé mais celle d’il y a cinquante ans. Là-haut, tout en haut de la chaîne centrale montagneuse où nous habitions, c’était tout pareil ! La pauvreté amène les mêmes comportements, les mêmes réflexes, les mêmes astuces. Il faut trouver à l’entour les matériaux pour construire la maison, torchis, paille,écorces, pierres. La maison principale éloignée de la pièce du feu. Le même bonheur paisible à discuter ensemble assis autour du feu le soir dans la pénombre, les mêmes odeurs ; l’eau dans les seaux, utilisée avec parcimonie ; les bambous dont on a retiré les nœuds pour en faire des tuyaux ; la marmite qui sent bon avec dedans toujours la même nourriture, nourriture qu'on trouve toujours délicieuse ; la bassine d’eau le soir pour se laver et la trombe d’eau sur la tête qui terminait l’exercice, la bonne odeur du savon.
Mêmes légumes, mêmes façons de les accommoder.
D’ailleurs, à mon grand plaisir, parfois Abeid achète un épis de maïs grillé qu'on se partage, le soir sur le chemin du retour, ou un morceau de manioc frit, ou une banane verte frite vendus sur le bord de la route, sortis tout brûlants de la bassine de friture. Comme repas du soir c’est suffisant pour moi. La cuisine ici comporte de grandes quantités d’huile. Du coup je n’ai faim qu’une seule fois par jour. A part une poignée de cacahuètes, décortiquées et ensachées sans doute avec des mains sales le tout dernier jour qui m’a ravagée, je n’ai jamais été malade. L’eau vient du Kilimanjaro, elle est très pure. Dans un petit restaurant où on mange pour moins d'un euro je me
suis régalée de poulet ! Nos soi-disant poulets fermiers peuvent aller se rhabiller ! Ces poulets-là ont le goût de ceux de ma maman !
Je suis étonnée ; on nous parle tellement des Africains qui se la coulent douce pendant que leur femme se tapent tout le boulot pour faire survivre la famille. Les hommes en Tanzanie travaillent beaucoup. Les hommes sont très actifs ici. Ils s’animent dans tous les sens, participent et suscitent l’activité générale. Si on considère le nord de la Tanzanie, c'est à dire ce que j'ai vu, c’est un pays qui donne l’impression d’être en essor. Les routes des axes principaux sont excellentes, y compris celles des montagnes pour désenclaver la population et la faire participer
activement à l’activité économique par l’agriculture. Profusion d’hôpitaux, et d'écoles. Soins gratuits dans les dispensaires. Très ferme gestion des nombreux parcs nationaux (il y en a 14).
C’est un pays gâté par la nature il faut dire mais qui sait en tirer parti pour toute sa population.
Pour les plus pauvres il reste encore la ressource d’être porteurs sur les monts Kilimanjaro ou Méru ou d’autres encore. La rude philosophie « Ne nourris pas les oiseaux ! Tu leur apprends à être mendiants » que, me prenant en faute, Abeid m’a assénée lors d’un pique-nique dans le parc Ngorongoro s’applique-t-elle aussi aux humains ici ? Pas de mendicité en tous cas et pas de personnes qui s’accrochent à vous pour obtenir que vous leur achetiez quelque chose. Beaucoup de petits vendeurs pourtant qui se baladent avec des présentoirs ou des paniers ou encore investissent un bout de trottoir où exposer leur maigre marchandise.
Par contre, les deux fois où je suis restée un moment seule, j’ai été accostée la première fois par un beau parleur qui tenait à me convaincre d’aller avec lui en boîte de nuit apprendre les danses traditionnelles, et la seconde par un tout gentil crampon qui voulait absolument me faire faire un safari dans un parc national ; j’avais beau lui dire que j’en avais déjà un de prévu il voulait que j’aille me faire rembourser pour le faire avec lui ; ces importuns-là ont été difficiles à écarter il a fallu le retour d’Abeid pour les faire disparaître immédiatement.
Les marchés sont nombreux en ville mais Rungis se fait sous les manguiers dans la banlieue : j'ai vu une montagne de carottes ici, montagne de bananes ailleurs, montagne de tomates aussi, montagne de leur sorte locale d'épinards encore, et puis ce troupeau croisé, amené tout paisiblement à l’abattoir. C’est décidé je serai végétarienne un jour !
Tout le monde ici connaît ou a connu la vie très dure ; aussi la solidarité fonctionne à plein entre eux, me confirme Abeid, partageant une « main » de bananes qu’il vient d’acheter entre lui, moi, et des prisonniers s’activant sur un bord de route en travail obligé.

à suivre..... Çà gaze?
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Margot Re: MZUMGO.......

Message  solaire Mer 4 Juil - 14:00

merci ma mimi

cet episode m'a bien plu. C'est super de pouvopir partager la vraie vie des gens et non pas de le voir en tant que touriste même si parfois il y a des situations cocasses

Merci du temps que tu passes pour nous

bisousssss
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Margot Re: MZUMGO.......

Message  Mimi* Mer 4 Juil - 14:55

Çà gaze? Cette femme ne voit pas ce monde avec des yeux de "mzumgo".... car elle est née et a grandi en Nouvelle Calédonie.... ce qui donne une autre vision des autres bien différente de celle étroite que l'on peut avoir depuis notre timbre poste français..... :3615:
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Margot Re: MZUMGO.......

Message  Mimi* Mer 4 Juil - 15:15

Çà gaze? "Safari dans les parcs :

Les courses et la préparation des repas reviennent au cuisinier dans les safaris. Mais nous avions décidé de faire l’économie d’un cuisinier et de préparer nos repas ensemble. Dimanche soir nous avons donc fait nos courses pour le safari. Que des denrées essentielles : farine de sorgho pour le porridge, farine de maïs pour le ugali, un œuf puis douze autres (Abeid contourne la difficulté ainsi maintenant , il ne sait articuler zeu), de l’huile, des tomates, des oignons, du thé, du lait en poudre, du sucre, des avocats qui mûriront beaucoup trop vite, des mangues et des oranges qui
resteront trop vertes. Et beaucoup d’eau en bouteille. Du pain de mie qui est tombé en miettes peu après. Du charbon de bois.
Ce safari ne devait pas se révéler gastronomique. On pourra facilement faire mieux une autre fois.
En tous cas nous sommes partis lundi matin pour quatre jours dans les parcs Manyara,
Ngorongoro, Serengeti.

C’est pénétrer dans un autre monde que passer la porte de ces parcs. Les animaux, légendaires, magnifiques, mêlés, vivant autour de nous en grand nombre et multiples espèces sans interrompre leurs activités à notre passage.Lundi soir, après avoir passé la journée au parc Mayana, nous avons cherché un hôtel dans un petit village proche. Nous avons trouvé un « caravansérail », des chambres en béton (une avec salle d’eau privée pour moi) autour d’une cour fermée pour les 4X4.
Puis nous avons parcouru les rues dans la nuit à la recherche de quoi manger.J’ai dormi
merveilleusement bien malgré l’animation et les chants dehors.
Le mardi a été consacré au parc Ngorongoro, sublime et immense cratère effondré, rempli d’une multitude d'animaux on essaie d'y respecter le mode de vie des Massaïs
Je croyais que c’était le « return point » du périple mais Abeid m’a dit que ce n’était rien à côté de ce qui m’attendait demain
Nous avons pris ce même jour, la route du Serengeti. Entrés dans le parc, God Bless, familier des lieux, nous a fait faire un tour dans le soir tombant vers un coin qu’il connaissait bien. Sur et au pied d’un tertre tout au bord de la route il y avait une quinzaine de lions (en comptant les huit bébés) qui dormaient. A un mètre des roues ils étaient si repus et si sûrs de leur invincibilité ensemble comme ça, que rien ne pouvait troubler leur sommeil. God Bless n’en avait jamais vu autant
Quelques gouttes de pluies nous firent nous hâter vers le camp où nous sommes arrivés à la nuit bien établie.
C’était presque le camp de Robert Redford et Meryl Streep dans « Out of Africa ». Deux grandes tentes ouvertes de tous côtés pour manger ; pour dormir des tentes assez hautes pour contenir des lits pliants ; pour nous ce sera la solution économique avec des tentes igloo et des matelas gonflables ; des gens dînent à la lueur des lampes à gaz, d’autres assis sur des troncs d’arbres autour d’un grand feu. Dans un coin plus discret des feuillages, un bâtiments très propre avec des wc d’un côté et des douches de l’autre. Des 4X4 bien rangés pour trouver facilement le matériel.
Un gardien s’occupe soigneusement du camp qui est agréable, accueillant. Il donne une sensation de bien être, on s’y sent chez soi.
Les cuisiniers s’activaient dans la cuisine ouverte aux quatre vents pour nourrir chacun ses touristes.
Nous avons allumé notre feu dans un coin des grands bacs de briques (quatre mètres de long, un de large) construits exprès pour ça.
L’un des premiers arrivés nous a passé un peu de ses braises pour faciliter la prise. La surprise de voir mzumgo dans ce territoire du camp exclusivement réservé masculin à la peau noire était prévisible. Pendant que God Bless et Abeid montaient les tentes j’ai préparé des oignons et des tomates rôties ainsi qu’un œuf puis deux autres (m’avait dit Abeid), pour servir avec le ugali dont il s’occuperait ensuite. Les rires des cuisiniers fusaient et j’entendais qu’on parlait beaucoup de mzumgo. Je dis tranquillement en tournant dans ma poêle :
« I have all understood !
Et eux tout de suite inquiets :
- All ?
Je ris et je dis :
- No … just mzumgo
Alors, drôlement soulagés, ils me souhaitent la bienvenue « Karibu sana » (bienvenue beaucoup), cessent leurs plaisanteries et m’avancent un siège.
Un orage d’éclairs en face.
Mais pas de pluie finalement.
Le ugali c’est délicieux et ma sauce aussi ; mais il y faudrait au moins encore un verre d’huile à leur goût.
On mange dans la nuit sous les étoiles.
Dans ma tente maintenant, sur mon matelas gonflable, je dors drôlement bien.
Le lendemain Abeid me demande de cuire une omelette avec un œuf puis deux autres tandis qu’il va puiser de l’eau chaude pour le thé dans la grande marmite dehors. Le gardien l’a posée sur des grosses pierres entre lesquelles un feu par lui dompté maintient la bonne température de l’eau, à disposition pour les cuisiniers.
La tente sera laissée en place puisqu’on dormira encore ici ce soir.
On part pour Serengeti toute la journée.

Dans le jardin d’Eden j’ai vu des merveilles ; j'ai vu aussi un guépard surveillant avec des yeux avides un troupeau de zèbres. Ceux-ci le regardaient, arrêtés. Abeid me dit :
"Le guépard est en train de faire son choix."
Un zèbre puis deux puis trois avancent vers le guépard. Je dis :
« Tiens ! Voilà des volontaires !
Mais Abeid dit :
- Non ! Ils font bien. Ils sont en train de dire au guépard qu’ils l’accueilleront comme il faut avec leurs sabots. C’est dangereux pour le guépard un coup de sabot. »
Plus loin deux lions et leurs petits dorment sous un arbre auprès d’un zèbre mort. Un zèbre marron donc encore enfant. Les lions chassent ensemble alors sabots ou non c’est difficile de leur échapper.
Ailleurs des vautours tournoient dans le ciel. Quand la route passe à proximité, nous voyons un buffle presque intact encore, couvert de vautours.
Un marabout observe sans intervenir.
Rien ne dérange la sieste des lions ; c'est à nous de passer dans la savane !
Le nouvel Eden, comme ils disent ici des parcs nationaux, a son ver dans la pomme : la chaîne alimentaire. Etrange que notre religion et ainsi notre culture, se soient focalisées sur le fait « coït », cet appel à la vie, et qu’on ait complètement laissé de côté, comme anodine, cette chose épouvantable qu’il nous faille vivre par la mort, mort violente, d’autres êtres vivants. C’est une violence énorme et dissimulée qui nous est faîte à nous aussi. Mais ça ne gêne personne ; ça serait normal.

Retour au camp.
Le vent est humide, la lumière s’est obscurcie, le temps s’est mis à la pluie. Les grenouilles, à la fête, vendent la peau de l’ours avant de l’avoir tué, elles coassent de partout dans la savane autour. Dans le bâtiment cuisine, des nouveaux cuisiniers sont arrivés. Un jeune homme s’active pour nourrir ses nombreux touristes. Nous avons mangé le porridge d’Abeid et tout va bien pour nous. Pendant que nous épluchons les pommes de terre du jeune cuisinier pour lui donner un coup de main, Abeid m’explique que les pommes de terre sont originaires d’Afrique. Je corrige « Ah ! Non ! Les pommes de terre sont originaires d’Amérique du sud et ont été ramenées en
Europe par les Français »
- Les Français sont comme les Massaïs rigole Abeid avec God Bless et les autres ; pour les Massaïs, toutes les vaches de la Terre leur appartiennent !

En face, sur la colline, je vois une vingtaine de girafes qui passent à bonne allure ; elles vont toutes ensemble dans le même sens ! C’est surprenant ! Je le fais remarquer aux autres ! Abeid s’écrie :
« Regarde les gnous !!!!! C’est la migration !!!!!
En effet, en bas des girafes il y a un flot de gnous qui ondule d’un bout à l’autre de la plaine ! Ils partent tous frénétiquement, girafes et gnous, vers un endroit du Serengeti où les pâturages seront délicieux après la pluie. Pourquoi les girafes ? Elles ne broutent pas dans les pâturages elles !
Nous restons longtemps à contempler cette joyeuse débâcle !
Puis la nuit est tombée.
Nous partageons ensemble le thé et au moment de servir sa "trupa", avec plein de légumes fondants, à ses touristes le jeune cuisinier nous en verse une grosse assiette. Il est formel, ça n’est pas de la soupe. Mais moi je ne vois pas la différence.

La nuit promettait d’être aussi agréable que celle de la veille. Pourtant ce ne fut pas le cas. Un lion d’abord puis une hyène se sont longuement exprimés dans la savane à proximité du camp. Rien entre nous et eux pour nous protéger. On ne peut pas dire que ça laisse de marbre.
Mais !!! … j’y pense ! Je n’avais aucune raison de m’inquiéter moi ! Il aurait d’abord mangé Abeid et God Bless dans la tente près du champ et quand il serait arrivé à ma tente, il n’aurait plus eu faim ! Saleté de chaîne alimentaire va ! Qu’est-ce qu’elle me fait dire !
En tous cas, grenouilles, girafes et gnous se sont bien fait eus car il n’y a pas eu de pluie.
Pendant que mes deux co-aventuriers défont nos tentes et rangent le bazar nickel dans la voiture, je me régale de thé très parfumé (parce que bouilli avec le sucre ça donne un arôme qui n’a rien à voir avec nos thés insipides en sachets) et du porridge du jeune cuisinier prélevé sur la casserole des touristes. Ce n’est pas du sorgho et pas de l’avoine ; ils ne savent pas m’en dire le nom européen.
Bientôt nous partons pour notre dernière journée dans les parcs. Nous traverserons le Serengeti et le Ngorongoro pour arriver ce soir à Moshi.
La vitesse est plus rapide à travers la multitude d’animaux mêlés. Le regard se fait plus anecdotique :
Une famille de phacochères déguerpit en courant sous les arbres, papa, maman, plein de petits.
Le moteur de la voiture affole une vingtaine de mangoustes dispersées qui réintègrent en quatrième vitesse la termitière qu’elle a investie et plongent dans tous ses trous
La carcasse du buffle n’est plus que des os.
Deux vautours énamourés sur un arbre à proximité se font un doux câlin. Corps tout proches avec les deux cous penchés l’un vers l’autre on dirait un cœur.

Des babouins ont envahi un arbre en fleurs. Il y en a partout. Un tout petit s’est trouvé une toute petite branche et manque de tomber quand un autre vient partager la place. Un mâle très décidé arrive, escalade le tronc et va directement chercher querelle au dominant qui piaille tout ce qu’il peut sans succès. L'autre le bouscule violemment, il tombe sur la branche au-dessous. Il doit céder son territoire au nouvel arrivant.
Un empala mâle surveille nonchalamment son troupeau de femelles. Au moins une cinquantaine personnelles à lui !
Mais il doit rester vigilant car, pas très loin, un troupeau de célibataires mâles erre en se demandant comment lui en piquer quelques unes.
Il n’y a pas de carcasses là où étaient le guépard et le troupeau de zèbres. Bravo les herbivores !
Chapeau bas ! On peut ne manger que de l’herbe et être courageux.
Deux léopards alanguis sur une branche d’arbre balancent leur queue.
Des bouses d’éléphants énormes !!! Il nous faudrait des mois pour … heu … too much
informations.
La savane est très sèche et toujours pas de pluie ;
Que de couleurs ici !!! Pays de couleur pour hommes de couleur !

Palette d’une richesse incroyable ; des tons irradiants ; des nuances de toutes sortes et ces contrastes radicaux qui brûlent dans l’or de la lumière. Nos peaux sont fades là-dedans. J’ai acheté un bracelet Massaï multicolore car ils étaient si beaux sur leurs poignets noirs ; à mon bras il est juste mignon
à suire.....
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Margot Re: MZUMGO.......

Message  solaire Mer 4 Juil - 17:55

merci ma Mimi

C'est vrai que ca doit être tentant de vivre cette aventure

Mais je me dis que trouillarde comme je suis - moi qui fuit devant une araignée !! je passerai des nuits blanches à avoir peur qu'un gros (ou petit) animal vienne me voir !

bisousssssss et à demain pour la suite
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Margot Re: MZUMGO.......

Message  Mimi* Mer 4 Juil - 18:35

Çà gaze? Le mieux dans ces endroits-là.... c'est de devenir fataliste et d'oublier toute peur..... et simplement "absorber" l'instant.... là... on découvre ce que "Carpe Diem" veut dire..... Bizoooo J\'en rougis Génial!
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Margot Re: MZUMGO.......

Message  Mimi* Mer 4 Juil - 22:10

Çà gaze? "Les accordailles de God Bless

Dimanche11novembre.

Je me prépare pour me rendre à la fête de God Bless.
C’est marrant comme nous avons un énorme pouvoir de renaître de nos cendres. Tous ces jours derniers j’étais tellement technique, adaptée, que je ne me rappelais plus que j’étais plusieurs.
Là, devant le miroir, je constate que j’ai sorti de mon coffret magique personnel, un personnage magnifique (et à toutes celles qui me lisent en ce moment et qui se trouvent magnifiques Karibu sana au club ; ya de la place pour tout le monde !) La volumineuse crinière de lion (la poussière rouge Africaine est une sorcière, elle donne à mes cheveux une de ces frites !) les yeux bleus clairs dans le visage bronzé, les rides qui disent ma longue histoire … j’aime bien transcender tout ça…

L’homme bougon, dans sa cuisinette, qui s’occupe du petit déjeuner en libre service et me marmonne un « jumbo » distant et distrait chaque matin, n’en revient pas. Il vient me servir, A MA TABLE ! une deuxième tasse de lait quand j’ai fini la première (Tiens ! il avait repéré mine de rien que j’en prenais deux ) ; il revient pour me proposer plus de pain ; il revient pour me proposer de la confiture ; il revient pour savoir si tout va bien. Ca va je vais faire bonne figure à la fête de God Bless !

Abeid m’avait prévenue : en Tanzanie il y a deux tribus qui ont une très grande réputation. Ses membres sont plus éduqués que les autres et, à l'école, il est pratiquement impossible de les rattraper dans les études. L’une est au nord, au pied du Kilimanjaro, l’autre est complètement dans le sud-ouest, au nord du lac Nyassa. Il faut rendre à César ce qui lui appartient, Abeid dit que c’est grâce aux missionnaires car ces deux tribus ont accueilli les premières missions il y a très longtemps.

God Bless fait partie de l’une de ces deux tribus, les Shabag. C’est le meilleur ami d’Abeid, ai-je conclu après que ce dernier m’ait expliqué qu’il aimait bien tous ses amis mais que pour une raison qu’il ignorait, God Bless était le plus fort dans son cœur.

Je suis accueillie très agréablement. Mon déficit de mélanine n’a pas l’air de les surprendre. Le fait que je vienne de France les a émus et honorés. Je suis arrivée tôt et ai pu observer tous les préparatifs. Mais avant il fallait repetit-déjeuner : bananes frites, viande et thé. Ma foi c’est bon et je n’ai pas besoin de me forcer pour finir la portion, trop restreinte à leur goût, que j’avais prélevée.
Je fais un tour côté cuisine. Dans la cour du haut, des grosses marmites sur des feux de bois. Une dizaine de femmes du clan, très absorbées et très soigneuses. On enlève les couvercles pour que je puisse regarder comment les ingrédients sont mélangés dans cette marmite-ci et autrement dans celle-là. Je me sens bien au milieu de ces femmes. Nous sommes du même bord, nous allons recevoir le clan de Martha. Nous devons faire honneur à God Bless.

Puis je suis allée voir les hommes qui s’occupent de la bière de sorgho dans la maison du bas. Ca sent la levure. C’est une bière qui est faite pour une journée, elle ne se conserve pas. J’ai dû goûter. Je n’aime pas mais ils ont l’air de la trouver bonne, ils en sont très satisfaits. Je ne lui trouve pas de goût et il y a tous ces petits grains qui gênent. La grand-mère de God Bless (grand-mère=Bibi ; les sœurs plus âgées du parent sont appelées grand mère ; les sœurs moins âgées que le parent sont appelées petite mère), par l’odeur alléchée, vient en demander une chope. Son petit fils lui en apporte une, bien remplie comme elle aime, et juste avant de la lui tendre il en boit
une gorgée. Déférence swahilie.

Bon c’est pas tout ça mais c’est l’heure du déjeuner !
Poulet rôti et chapatis moelleux, bien gorgés d’huile comme il faut.
Ca sent bon … c’est bon …
God Bless a l’air stressé même s’il ne s’occupe de rien. Il se calme en écoutant de la musique les yeux fermés. Je remarque toute l’affection autour de lui. Tout le monde aide efficacement à sa fête et de toutes les façons possibles : ménage, festin, aménagement du lieu de rassemblement. On vient lui demander conseils et consignes de temps à autre. Il est très aimé et respecté, des plus jeunes aux plus vieux.
Voilà tout est prêt. Les hôtes vont bientôt arriver.

Tout ce petit monde agité et dépenaillé s’éclipse et refait irruption lavé et habillé pour la fête.
Quelle élégance ! Celle des femmes est un peu engoncée dans des tailleurs chics et leurs étoles assorties mais les hommes ! Des pantalons larges dans des tissus souples, des chemises unies, fluides, des harmonies audacieuses et bien choisies, ils sont minces et beaux ! Ils ont gardé la même aisance dans leurs gestes nouveaux, assortis à leur nouveau look d’ "hommes des villes".

L’ambiance en est toute transformée.
Elle est solennelle.

Les invités ne tardent pas à arriver, tout aussi festivement vêtus. On nous assoit, les deux clans face à face. Un homme vient me saluer avant d'aller s'asseoir :
"Je vous ai repérée car vous êtes blanche et nous sommes noirs." rigole-t-il amicalement.

Il fait chaud. La soif ne doit pas gêner le déroulement de la cérémonie. On nous distribue des coca et des fanta (rafraîchis !!! c’est un exploit et un raffinement car il n’y a pas de réfrigérateur ; ça n'est pas un appareil utilisé dans les foyers tanzaniens ; Ils font leurs courses chaque jour et les animaux sont abattus chaque jour pour les repas de la journée, d'où une viande élastique et difficile à mâcher).

Puis il y a des discours de bienvenue ; des réponses aux discours ; les présentations. Après les têtes des clans, chacun doit venir se présenter dans un ordre non établi. Celui qui veut se lève, vient au centre et se raconte pour dire sa place dans son propre clan. La politesse veut qu’il n’y ait pas trop de temps mort entre les volontaires. J’ai eu mon tour, traduite par Abeid qui s’est présenté juste après. Cela a montré que je ne parlais pas swahili et le prestige de God Bless s'en trouvait augmenté : c'est donc qu'il maîtrisait bien le français en plus de l’anglais officiel car nous bavardions souvent ensemble.

En réalité il a peu de français et je ne sais jamais quand il ne me comprend pas car sa forme de courtoisie veut qu’il fasse comme si. Quand je veux être sûre et que sa réponse est importante je demande à Abeid de lui redire en swahili après moi.
Durant tout ce temps, les participants sont très recueillis, très attentifs, très respectueux. C’est un moment vraiment important que cette union de deux clans. Martha n’est pas là ; elle n’a pas à être présente lors de ce rapprochement. Elle sera la pierre précieuse donnée le 23 février, jour du mariage. J’espère que cette pierre sera de l’eau la plus belle car je souhaite que God Bless, à la gentillesse et à la sensibilité sans pareilles, soit heureux. Le mariage est arrangé mais il a rencontré plusieurs fois Martha et l’apprécie beaucoup.

D’autres discours pour que tout le monde se mette à l’aise car maintenant on va prendre le premier repas ensemble.
Les plats arrivent. C’est beau, ça fait envie.
Les premières, les femmes se dirigent en file vers le buffet et en reviennent avec des assiettes très garnies. Je prends la suite après la dernière. Je mets, comme toutes, mes mains au-dessus de la bassine et me les lave longuement sous le filet d’eau qu’on verse. Je suis préoccupée.
Comment convaincre mes hôtesses de me donner beaucoup moins qu’aux autres ? Ça ne va pas être facile. Et en laisser une partie dans l’assiette n’est pas envisageable. Par chance, God Bless m’accompagne et c’est lui qui donne la directive. En tant que personnes de la ville (m’explique Abeid) God Bless et moi avons droit de ne pas faire honneur comme il se doit à ce festin sans que ce soit dépréciant. Je suis soulagée. C’est, mine de rien, à 17h, mon quatrième solide repas de la journée ! Je peux beaucoup côté gourmandise, mais la physique des contenants à quand même quelques lois incontournables.

Pas de couverts. L’assemblée mange avec les mains. Quand c’est une cuisse de poulet ou une banane verte rôtie, c’est simple. Mais là, cette viande coupée petit dans la sauce qui sent le gingembre, ce riz cuit d’un beau marron luisant (mais comment font-elles ça ?) dont les grains se détachent délicatement, cette salade de chou émincée si finement …bon j’attaque les rondelles de concombre … fastoche … mais après ?
Me revient cette scène à la cantine ; certains de mes élèves mangeaient à la main dans leur assiette. J’avais exigé qu’ils utilisent des couverts. Ils m’avaient répondu : « Chez nous on mange comme ça » Et moi royale :
« Si je vais manger chez vous je mangerai à la main comme vous ; mais ici à l’école vous
apprenez à manger avec des couverts ».
Hé bien voilà des paroles qui demandent une réalisation aujourd’hui. Pendant notre périple dans les parcs, God Bless m’avait expliqué que manger à la main avait des règles précises il fallait utiliser uniquement le pouce, l’index et le majeur fastooooche

Nous mangeons délicatement et silencieusement cette nourriture qui n’est pas que de la nourriture. Que chacun se mette à parler avec son voisin romprait le lien qui doit rester établi entre les deux clans face à face. Et puis il y a tant d’informations essentielles qui se perdraient par manque d’attention. Les mets délicieux renseignent inconsciemment sur la qualité de l’attente des hôtes. La subtilité des saveurs mêlées dit le degré "d’éducation", de raffinement, du clan qui reçoit, le degré de respect qu’il se porte à lui-même et celui qu’il attend des autres. Ce respect qui rejaillira sur le clan qui vient s’unir.

Suit la mise en circulation des calebasses de bière. Chacun de ceux qui le souhaitent boit et la passe à son voisin ; Un inconnu entre dans la cour et s'installe à une place stratégique, au carrefour de la circulation des calebasses. Son regard fiévreux montre qu'il avait commencé ailleurs. Personne ne le connait, il est à sa place pourtant comme vous aviez la vôtre si vous étiez passés par là. Il ne parle à personne, il attrape les calebasses, boit, fait suivre, attend la prochaine...
A la fin de la cérémonie nous sommes tous invités à ne pas repartir, il faut rester dormir ici, il y a toute la place nécessaire.
Politesse swahilie à ne pas prendre au mot bien sûr !


à suivre....
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Margot Re: MZUMGO.......

Message  Mimi* Mer 4 Juil - 22:37

Çà gaze? "chez la Bibi d'Abeid

Départ pour la visite chez la Bibi d'Abeid

Ce matin du lundi 12 novembre nous avions rendez-vous à 8h30 pile. A 8h30 pile swahilies (11 h quoi) Abeid arrive et nous partons à la gare routière chercher un bus longue distance pour Mongo.
Sur cette grande place, un ballet de bus qui arrivent, qui partent et beaucoup, beaucoup, de gens.
Sous la halle, Abeid me donne le siège du stand d'un vendeur de billets qui est pour le moment en train de se balader sur la place à essayer de vendre ses tickets car la concurrence est rude.
Plusieurs vendeurs se sont déjà précipités vers nous mais le prix est trop élevé du fait de ma présence. Abeid, qui fait souvent ce trajet, est inébranlable, pas question de payer plus pour un microgramme de mélanine en moins. Il s'en va seul sur la place. Durant son absence, le vendeur duquel j'ai pris la place est venu plusieurs fois farfouiller dans ses papiers mais ma présence sur son siège ne l'a aucunement gêné, même si nous avions refusé ses billets. Voilà Abeid de retour avec les billets qui lui conviennent. Nous attendons le bus.
D'un coup je vois quelque chose de terrible ; ça me fait un grand choc comme quand je vois un homme ivre ; j'ai toujours eu une peur panique des masques et, là-bas, une DarthVador woman s'agite beaucoup sur la place, assez autoritaire me semble-t-il, l'index en avant en s'adressant aux gens autour d'elle ; elle a la tête prise dans une sorte de cage noire qui lui cache complètement tout le visage et s'arrête aux épaules.
J'arrive à peine à parler je dis à Abeid :
- Là !!! Là !!!
- qu'est-ce que c'est ? Me demande Abeid tranquillement en regardant dans la direction
- Cette femme ? Qu'est-ce qu'elle a ?
- Ah ! C'est une femme qui vient de la côte sûrement ; il y en a beaucoup comme ça là-bas vers Zanzibar. Elle est musulmane ; elle se cache le visage par fierté.
- Comment ça par fierté ?
- Elle est fière de sa personne quoi
- Elle se balade avec cette sorte de cage autour du visage et elle est fière ? Fière de se promener dans sa prison ?
Pour Abeid la fierté de cette femme ne semble pas faire de doute ; c'est mon interprétation qui est incompréhensible pour lui. De quelle fierté peut-il donc s'agir ? Dédain peut-être parce qu'on n'a que faire d'être vue ? Parce que le visage n'a pas à accaparer l'expression ? Abeid ne sait pas me dire et ma curiosité reste insatisfaite.

Nous montons dans le bus. Sur les pare-brise arrière et avant, en gros, "God bless us"
Une multitude de vendeurs de petites marchandises très diverses tournent autour du bus avec leurs paniers ou leurs présentoirs hissés à bout de bras jusqu'au fenêtres : marchands de biscuits, marchands de boissons fraîches, de bananes, de ceintures, d'étuis de portables, de babioles pour les cheveux ou les bras, de cacahuètes, de morceaux de canne à sucre tronçonnée et épluchée, d'épis de maïs, de samosas, de paquets de pain de mie, de sachets en plastique, d'ananas ...

Voyage confortable, le bus est agréable, la route est en parfait état, le paysage est magique :
" Abeid tu te rends compte que ton pays est si beau ou tu as l'habitude ?
- J'ai l'habitude... J'ai beaucoup aimé la France mais Moshi c'est la plus belle ville du monde. La Tanzanie est le plus beau pays du monde."
Oui, il a raison, à moi aussi la Tanzanie fait partie de mes pays les plus beaux du monde ; son organique beauté, la douceur de ses moeurs, l'harmonie des relations entre les gens, le sourire et le rire facilement sur les lèvres, la solidarité ordinaire maintes fois observée... Déjà, faire ce long trajet sans voir la route souillée par un seul sac en plastique en dit long sur l'idée que les habitants de ce pays ont de la vie (vision de cauchemar des sacs en plastiques jonchant des hectares et des hectares au Moyen-Orient, Jordanie, Syrie, ou Viêt-Nam en Asie pour ceux que j'ai vus)
A Mongo, nous quittons le bus "God bless us" pour un mini bus. Je suis assise à côté du
chauffeur. C'est la place confortable où le moteur vous crame les mollets. Mais sur le pare-brise un auto-collant rassurant, "This car is protected by the blood of Jesus". Que le Père se repose, son Fils a pris le relais. J'aime bien aussi l'autre auto-collant à côté " Payer ses impôts c'est être patriote c'est aider à la construction de son pays". Pour moi, l'invention de l'impôt est le PREMIER signe de civilisation chez les humains, tout le reste n'est que balbutiements de civilisation à côté.
En "France" (enfin... il s'agit de l'Austrasie berceau de la dysnatie carolingienne) il arrive au sixième siècle, avec la reine d'origine wisigothe Brunehaut qui, pendant sa régence, 575-596 , l'emprunte à l'Espagne, son pays d'origine, et l'instaure pour construire routes et hospices chez nous.

A Luchoto, petite ville touristique dans la chaîne montagneuse d'Asumbara, Abeid a réservé des chambres dans un hôtel mignon, plutôt cher pour la Tanzanie (Abeid a une idée très précise sur ce qui est "convenable" pour une Européenne). D'accord Abeid mais ils sont radins ou quoi dans cet hôtel-là ? : Pas d'eau chaude pour la douche, il faut la prendre à partir du robinet du mini lavabo qui, seul, en donne. Pas de serviettes. Attention ! Nous ne sommes plus dans la plaine torride là, nous sommes dans la montagne d'Asumbara et, pour la première fois en Tanzanie où jusque là un simple drap était difficilement supportable, je vais dormir avec des grosses couvertures.

Le lendemain on prend un bus protégé par Allah et Il se débrouille pas mal non plus car on arrive à bon port et on descend en face d'un chemin qui monte dans la montagne.
Le chemin se promène joliment entre les cultures de taros, bananiers, canne à sucre, manioc, poivrons, aubergines, tomates... Toute la montagne est cultivée, on dirait un damier. Aucun engin ! Tout à la pioche jusqu'en haut.
En prévision j'ai pris depuis quelques jours mon médicament "4X4 tout terrain" pour mon genou.
Nous montons, nous montons, nous traversons ruisseaux, champs, cascades.
et après une heure et demi débouchons très haut sur une arrête de la montagne où est construite une école dans une mission.
C'est justement l'heure de rentrer à la maison (l’enseignement se fait souvent en deux temps dans la journée : le matin pour une première partie des enfants, l'après-midi pour la deuxième partie).
Les écoliers en uniforme nous emboîtent le pas et la troupe jacasse et rigole derrière nous. Voici qu'il y a un évènement dans le village aujourd'hui ! Il faut savoir tout et ensuite diffuser ces nouvelles
Par téléphone portable, Abeid a prévenu sa grand-mère, ici on dit Bibi, de notre arrivée imminente ; elle nous attend devant sa case. Femme altière, très à l'aise, simple et déterminée, tranquillement sûre d'elle.
Je pense à mon grand-père ; lui aussi était un Seigneur ! Même dénuement mais quand il faisait à quelqu'un l'honneur de manger à sa table ce n'était pas rien ! Je n'ai jamais vu quelqu’un y être insensible.
La Bibi d'Abeid est descendue se charger de nos fardeaux ; chaque fois que nous rencontrons quelqu'un de la famille d'Abeid, j'ai remarqué que cette nouvelle personne prenait en charge les sacs jusqu'à ce qu'on se sépare)
Nous entrons dans la maison de torchis roux, la pénombre est délicieuse après la longue marche.
Nous nous asseyons sur des petits tabourets bas non loin des braises discrètes dans le four d'argile au sol ; je me sens merveilleusement bien dans la fraîcheur de la terre.   Nous sommes paisibles tous. Personne ne fait d'efforts pour animer la conversation, ou elle est naturelle, ou on peut se taire, ça n'a pas d'importance. Des cousins passent pour saluer. Il y a beaucoup d'affection entre les divers membres de la famille et tous sont heureux de revoir Abeid. D'ailleurs, à ma surprise, il y a un deuxième Abeid ; un peu plus âgé. Il est venu pour cette occasion aider sa grand-mère et cuisine avec des gestes lents, doux, notre repas.

Au-dessus du foyer , une gerbe d'épis de maïs attend le moment des semailles, bien à l'abri de ses prédateurs dans la fumée ; à 50cm du plafond, un caillebotis où sont posés des épis de maïs et des racines de manioc à sécher. Ce matin, Bibi en a pris pour le piler et a préparé un tapioca très ferme qui finit de sécher sur les braises. Abeid-ainé et elle ont cuisiné quelques poissons séchés avec des oignons et des tomates et beaucoup d'huile; c'est un repas de bienvenue car ici, en haut de la montagne, le poisson n'est pas un produit facile à se procurer.
Après le rituel de l'eau versée sur les mains, nous détachons du plat commun des boules de tapioca et les trempons dans la sauce de nos petits bols personnels.

"Mange mon enfant" me dit Bibi
Un autre cousin arrive avec des tarots et des patates douces. Le temps qu'ils cuisent nous irons rendre visite à un cousin et une cousine des deux Abeid, à leur école.
On repart tous les trois dans la montagne, ce n'est pas très loin.
Les deux adolescents sont surpris, intimidés. La petite famille est heureuse ensemble. Ils sont très fiers de poser avec moi sur la photo
Sur le chemin du retour la pluie nous surprend et nous trempe. Arrivés chez Bibi, nos vêtements sont déjà secs et nous en sueur.
Voici que les tubercules sont cuits ; j'adore ! Ils me sont pleins de réminiscences.
Difficile, le moment de la séparation est bien là. J'ai un moment de panique quand Bibi nous dit que nous ne devons pas partir, qu'il nous faut rester dormir ici. Et nos affaires qu'allions-nous en faire ? Comment les récupérer à l'hôtel ? Il faut que je rentre demain car mon avion est après-demain...
"Politesse swahilie" me rassure Abeid

Bibi nous accompagne un peu, nous marchons à reculons pour la voir encore, encore, encore, avec son bras levé et la main qui s'agite.
Nous passerons visiter le dernier frère d'Abeid dans son pensionnat puis chercherons la route et le bus.

Le jeune homme a le charme et l'assurance des cadets qui ont toujours fait craquer leur monde et à qui il a toujours été impossible de résister. On connait bien la puissance de ce sourire qui obtient toujours la défaite des adultes en face. On est nombreux à avoir eu cette sorte de petits sorciers à élever comme on pouvait, tant bien que mal, car en fait c'est eux qui nous mènent plus que l'inverse.
Il est bien tard !!! Heureusement Abeid-ainé ne nous a pas quittés. Il connait l'endroit comme sa poche, nous coupons derrière lui les champs et la montagne tout droit. Prévenant et attentif il me donne le bras dans les endroits difficiles. La pluie nous retrempe, nous séchons, nous suons, nous remouillons, re-séchons, re-suons et arrivons à la route par cet énorme raccourci. Nous nous asseyons sur la margelle du pont en attendant le bus.
Nous sommes mouillés, j'ai froid, la nuit tombe, pas de bus.
L'avenir ne m'inquiète jamais mais le froid SI. Abeid-ainé agite les bras, en vain, devant les rares voitures qui passent.
Une 4X4 conduite par des Européens passe, aussi dédaigneuse, puis ... s'arrête. Abeid me dit joyeux :
"Ils t'ont vue"
Nous disons, à regret, adieu à notre compagnon et courons vers la voiture. Dans l'air que nous agitons pour monter dans le véhicule je sens, consternée, l'odeur violente que nous dégageons !!!
Les pauvres touristes ! Un mélange terrible de feu, de sueur cuite et recuite, de crottin de chèvres.
Ce sont des Hollandais. Ils s'enquièrent de mon origine. Parlent chaleureusement avec Abeid ... mais m'ignorent. Même quand je leur dirai au revoir et que je les remercierai ils ne me répondront pas.
Enigmatique ou trop précipitée réprobation.

En descendant de la montagne le lendemain, notre bus est assailli par les petits vendeurs de fruits et légumes : c'est un ballet magnifique, autour du bus, de paniers de bassines de poivrons, chou, carottes, tomates, avocats, pommes de terre violettes, mangues, oranges, bananes, tarots, manioc, pêches, anones, et bien d'autres encore.
En bas, quand nous serons arrivés dans la plaine, les petits vendeurs proposeront d'autres couleurs d'autres nourritures d'autres objets.
Le bus longe des hectares et des hectares de champs de sisal dont la Tanzanie est exportatrice.
Quand on approche de Moshi, à un arrêt, un homme, jeune encore, frappe le bus sous ma fenêtre et crie :

"Mzumgo !"

Tiens ! J'avais complètement oublié ça !
C'est un mot qui peut difficilement passer pour respectueux mais dit avec de la sympathie dans les yeux allez cool Raoul ; mais là ! si brutalement ! Non. A celui-là je dois faire une petite leçon de politesse n°3, celle que je n'ai pas apprise chez mes parents ni chez les religieuses. J'ouvre ma vitre juste ce qu'il faut pour passer la tête de façon à ce qu'Abeid n'entende pas et ce qu'il doit savoir ce gars, je le lui explique bien :
"Mzumgo elle te dit merde."
Je n'avais rien parié sur l'explicite, puisque ici on ne comprend pas le français, mais l'implicite a marqué des points ; il me laisse tranquille.
Je referme ma vitre. Abeid est occupé il n'a pas fait attention ? J’espère.
Bon ben ... Faut reconnaître, ça fait du bien.
Et pourquoi fallait-il que j'y repense alors ?! La même scène presque, dans le métro, à Paris.
Scène de refus du différent dans le groupe : c'est le matin on va au travail. J'ai une place au fond du wagon debout, tenant le tuyau. Je réfléchis à la journée qui arrive.
"Ya trop de noirs dans le métro"
D'où sort cette phrase ? C'est le type à coté de moi accroché au même tuyau. Je suis en colère je lui dis :
-Il y a trop de cons aussi dans le métro ; et si vous descendez ça en fera un de moins !
Et celui à qui l'injure raciste était destinée, assis sur la banquette en face de nous, sans même se détourner de ses pensées me dit :
- Laissez madame.
La phrase raciste lui en avait touché une lui sans bousculer l'autre, ça ne l'intéressait pas, ça ne concernait que celui qui la disait ; mais moi, en le replaçant lui au centre de la scène, je lui cassais les pieds, il avait autre chose à penser.
Ça avait une toute autre allure.
Bon ben ... je ferai mieux une autre fois.


Dernière journée

Dernière promenade à Moshi
J'entends des : " Marie !"

Et je suis heureuse de rencontrer Vincenty avec qui nous avons partagé mon premier repas. Et encore :
" Marie !"

Oh ! Le petit cuisinier du Serengeti ; oui quel bonheur de le rencontrer ici ! Je me rends compte alors de l'importance de ces moments fugaces à la lueur de la lampe dans la nuit noire étoilée.

Mais !!! Voici que mon récit est terminé. Et je suis à l'aérodrome avec mon ami Abeid ; toute cette attention, cette gentillesse, cette responsabilité qu'il a sans cesse manifestées !
Mon guide du Kilimanjaro avec sa belle philosophie

("Quand on me confie quelqu'un de faible sur le Kili, je me dis " Ce monsieur, cette dame, est venu de très loin, a payé très cher pour vivre sa légende personnelle, il faut que je fasse tout mon possible pour l'amener jusqu'au bout")

Il a été aussi le même efficace guide de Tanzanie. La géographie l'ignore mais les voies que ses ouailles ont montées portent leur prénom : qui sait que la voie Marengu s'appelle maintenant la voie Marie ? Notre voie peut aussi être celle de quelqu'un d'autre que nous ne connaitrons jamais mais qui est aussi pour toujours dans le coeur d'Abeid, ainsi la voie Machamé s'appelle maintenant voie Bénédicte et François ; ils ne se connaissent pas mais c'est le nom de la voix maintenant.

Je repars avec cette importante leçon qu'il m'a donnée :
"Tu as vu ? Maintenant que tu te sens complètement bien parmi nous, les autres aussi se sentent complètement bien avec toi, même si tu es blanche"

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Margot Re: MZUMGO.......

Message  Louise Jeu 5 Juil - 5:29

C'est une belle écriture, bien vivante. Je ne connais malheureusement pas l'Afrique et pendant la lecture j'avais beaucoup à absorber pour "y être": l'auteur réussit ce tour de force! Quant à la critique du racisme, elle m'a paru un peu surfaite: il n'y avait pas lieu d'insister. Tout le texte est suffisamment ouvert, parle amplement du respect des cultures, des couleurs, des moeurs!
Merci Mimi pour nous avoir offert ce très agréable récit.
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Margot Re: MZUMGO.......

Message  solaire Jeu 5 Juil - 9:16

Merci ma Mimi

J'ai vraiment adoré ce récit et voyagé grâce à toi

De gros bisousssssssssss
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Margot Re: MZUMGO.......

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